vendredi 21 février 2025

La Mémoire du Thé

 La Mémoire du thé


 

De 1988 à la première décennie des années 2000, Lisa See raconte l’histoire de trois générations de femmes du peuple Akha du Tibet, désormais vivant dans les montagnes de Chine. So-Sa, appelée « Ah-ma » est la sage-femme du village de la « Source du Printemps ». Elle détient la connaissance de la nature, des remèdes naturels et un terrain transmis en héritage avec des arbres vieux et inestimables. Lyn-Yan, son aînée, très volontaire, acquiert l’instruction. Particulièrement brillante, elle aide sa mère lors des pénibles récoltes de thé, étudie avec le professeur Zhang et tombe amoureuse de San-Pah, un garçon d’un autre village dont elle aura une fillette hors mariage, Yan-Ye. Pour cette raison, le bébé sera abandonné et adopté par un couple américain qui la renomme « Hayley ». Ces personnages évoluent au fil du temps autour d’une seule thématique centrale, le thé. L’auteure s’est très bien renseignée : on apprend tout ou presque sur la récolte faite par des ouvriers exploités mal payés, sur les diverses variétés dont le précieux « Pu’er », le commerce, l’avidité des vendeurs. Les termes techniques et les explications abondent, ce qui rend la lecture instructive (et rébarbative selon les lecteurs d’après les commentaires sur les sites). C’est très intéressant.

Passons à l’intrigue. Nous suivons Lyn-Yan à peine adolescente dans son dur chemin de vie qui commence dans la pauvreté et le besoin. Malgré la précarité, elle n’est pas malheureuse. Ci-Deh, sa meilleure amie, sa famille lui apportent un certain réconfort. Elle travaille sans ménager sa peine. Parfois, elle croise un certain monsieur Huang, un acheteur de thé, qui convoite les feuilles les plus rares des théiers sacrés hérité par les femmes. So-Sa refuse de les lui vendre mais n’hésite pas à soigner le jeune enfant de l’homme d’affaires Chinois qui est très malade, le jeune Xian-Rong. Dans ce contexte, Lyn-Yan apprend, prend conscience du poids des traditions et des superstitions. Un jour, elle assiste à l’accouchement de Deh-Ja, mariée à Ci-Doh, le frère de Ci-Deh. La pauvre femme met au monde des jumeaux. Or, les naissances multiples sont considérées comme impures. Les bébés sont immédiatement tués et leurs parents bannis du village. Lyn-Yan en est horrifiée. Plus tard, elle retrouve San-Pah, un garçon un peu plus âgé qu’elle et en tombe amoureuse. Or, ses parents ne veulent pas d’un tel gendre. Néanmoins, elle le fréquente. Les jeunes filles Akha semblent bénéficier d’une grande liberté sexuelle. Elles peuvent « voler l’amour », soit toutes avoir des relations sans être mariées avec l’accord de société. Sauf que les enfants nés hors mariages sont considérés comme des rejets humains et doivent disparaître. Lyn-Yan tombe enceinte pendant que son amoureux est parti en Thaïlande pour travailler. Sa mère l’aide à accoucher en secret sur son terrain mythique et prévoit de tuer le bébé impur. Mais elle se ravise. Séduite par ce petit être spécial, elle ne se résigne pas à cette horrible tâche. Mère et filles décident de laisser « Yan-Ye » à l’orphelinat local. Bien sûr, les jours suivants, les regrets et les remords les rongent. Quand San-Pah revient avec l’intention d’épouser Lyn-Yan (et se fait encore refuser par la famille), il apprend qu’il est père. Il souhaite récupérer Yan-Yeh. Pour cela, Lyn-Yan et lui se marient dans l’urgence et vont à l’orphelinat. Malheureusement, le bébé a déjà été adopté aux Etats-Unis. Désespéré, le couple s’exile en Thaïlande et mène une existence misérable et affreuse. Mieux, Lyn-Yan découvre que son mari se drogue, ce qui rend leur relation infernale. La jeune femme prend son courage à deux mains pour s’enfuir. Cet acte peut lui valoir la mort de la main de son époux selon la loi Akha. Lyn-Yan se sauve. San-Pah la rattrape au moment où un tigre la menace dans la forêt. Il tire des flèches sur l’animal qui l’attaque. Avant de mourir, le tigre tue le jeune homme. Lyn-Yan s’en retourne chez elle. Elle en repart pour habiter dans la ville de Kunming. Elle parvient à intégrer l’école du thé Pu’er pour y suivre des études avec succès. A Canton, elle ouvre « Fleur de Minuit », sa boutique de thé avec un associé secret. Commerçante réputée, elle attire l’attention d’une dame âgée qu’elle croise dans un parc. Comme de nombreuses mères d’un certain âge qui abordent les jeunes filles pour trouver leurs futures brus, celle-ci cherche un mari pour son fils, Jin. Malgré les réticences, Lyn-Yan accepte de rencontrer Jin… Et c’est le coup de foudre ! La jeune veuve de la minorité Akha épouse un très riche homme d’affaires chinois de la majorité Han qui commerce et qui vit une partie de l’année aux Etats-Unis. C’est une aubaine pour Lyn-Yan qui tente de retrouver sa fille qui vit quelque part dans le pays. De plus, Lyn-Yan devient mère d’un enfant qu’elle appelle « Jin-Ba » et Paul (car les Sino-Américains prennent des noms occidentaux). Pendant que Lyn-Yan poursuit son existence qu’elle raconte à la première personne du singulier, l’auteure nous donne le point de vue de sa fille Yan-Yeh devenue Hayley en Amérique. Devenue la fille du couple Davis (une biologiste et un paysagiste), elle est entourée d’amour. Gâtée, elle ne manque absolument de rien. Ses parents ne la coupent pas de ses racines et fréquentent avec elle une association chinoise. Sauf que la fillette asiatique ne ressemble pas aux Chinoises mais bien à son peuple, avec son teint plus brun, ses yeux en « forme de feuilles » selon ses dires, son nez à l’arrête plus proéminente. Hayley se trouve confrontée à la réalité des enfants adoptés qui craignent d’être renvoyés dans leur pays d’origine par leurs parents adoptifs et qui recherchent leurs véritables parents. Lisa See fait le tour de la question, soulève les points divers, les clichés, les réalités de l’adoption. En bref, son livre est un véritable plaidoyer contre l’adoption qu’elle montre sous un autre jour. Elle apporte des arguments valables. Le pire, c’est qu’elle n’a pas tort.

L’auteure fait passer divers messages. Tout d’abord, elle dénonce les trafics d’enfants de la part des Chinois. Les bébés des orphelinats ne sont pas tous abandonnés. Beaucoup sont enlevés à leurs familles. Le but est de vendre le plus cher possible comme des marchandises ces petits arrachés à l’amour de leurs parents qui ne possèdent rien (et ne peuvent pas se défendre). Bien évidemment, ce commerce honteux est déplorable. Ensuite, Lisa See dénonce les traditions des minorités ethniques. Tuer des jumeaux ou des bébés nés hors mariage mène naturellement à des situations d’abandon. Les mères accouchent dans la clandestinité et tentent de sauver leurs bébés d’une mort inévitable en les laissant devant un orphelinat. Certes, ils auront la chance de vivre mais au moment où ils entrent dans l’établissement, ils deviennent également des produits à vendre. Le pire reste à venir. Les « rejets humains » prennent une valeur marchande. Ce qui ne vaut rien au village se monnaie bien ailleurs. En somme, sans une once d’empathie, l’opinion de la Chine sur ces bébés scandalise. L’auteur nous montre que ces innocents sont littéralement considérés comme des déchets… que l’on vend à prix d’or aux Occidentaux. Non seulement les associations et les autorités se débarrassent de bouches à nourrir mais font des affaires ! Bien sûr, Lisa See ne cautionne pas cela. Personne ne le peut. Mais elle n’est pas tendre non plus pour les adoptants. Le couple Davis et leurs amis de l’association symbolisent les Américains qui adoptent. L’auteur les présente comme des gens égoïstes qui veulent absolument un enfant à aimer. Ils sont prêts à tout pour en obtenir un et ils payent le prix fort. Une fois obtenu, l’enfant a droit au traitement classique. Ses nouveaux parents le gâtent, le pourrissent, lui offrent affection et stabilité. L’enfant adopté ne manque de rien du point de vue matériel. Il étudie, a accès à beaucoup de loisirs culturels et sportifs, semble avoir une vie idéale. Du point de vue moral, c’est autre chose. Avec le groupe de parole des jeunes Chinoises adoptées, Lisa See révèle les pensées et les souffrances endurées très connues. Bien sûr, les parents adoptifs blancs font tout pour elles mais les ont introduites dans une société où elles ne peuvent pas s’intégrer. Chaque jour, elles croisent des gens intolérants et malveillants qui leur lancent à la figure tous les clichés auxquels elles doivent se conformer (du style, tous les Asiatiques sont forts en maths, scientifiques, brillants, travailleurs, sérieux, geeks, intelligents, etc…). Très pesant ! Le poids crée une angoisse et un mal être difficile à vivre. Les jeunes filles Chinoises sont vraiment en colère, révoltées. Dans tous les cas, on leur rappelle leurs origines sans arrêt. Non, elles ne peuvent pas ressembler à leurs parents adoptifs, surtout s’ils appartiennent à un autre type ethnique. Leurs visages parlent pour elles et montrent à tout le monde que les adultes qui les élèvent ne partagent aucun gène avec elles. Résultat, indirectement à cause de la stigmatisation collective, les jeunes filles adoptées finissent par rechercher leurs mères biologiques. Capables de pardonner l’abandon, elles leur cherchent des excuses, les idéalisent. La conséquence est que leurs parents adoptifs passent au dernier plan. Ils perdent de leur importance. Bien fait pour eux, puisqu’ils ont créé des êtres déracinés, sans repères et à la recherche de leurs origines. Le comportement d’Hayley illustre la situation des enfants adoptés toujours motivés à chercher leurs véritables géniteurs. Elle change son histoire grâce à sa volonté de retrouver sa mère. Elle redevient Yan-Yeh face à So-Sa et Lyn-Yan. L’auteure n’indique pas quel sort elle réserve au couple Davis. Le lecteur peut supposer qu’ils resteront toujours dans la vie de leur Hayley, mais perdront de leur importance. Avant, ils se trouvaient au centre de son monde. Désormais, l’univers de leur fille se déplace vers la Chine. Les Davis et tous les adoptants méritent-ils leur sort ? Les adoptées paraissent bien ingrates. Elles possèdent surtout des raisons légitimes selon l’auteure qui nous fait méditer. On ne s’attend pas à tout cela quand on pense à l’adoption. Le lecteur reçoit en pleine figure une multitude d’informations difficiles à encaisser du premier coup. Mais cela nourrit sa réflexion.

 Le point de vue de Lisa See ne manque pas d’intérêt tout comme la description du monde du thé. En attendant, l’histoire continue. Lors de son abandon, Hayley avait reçu des effets personnels : une coiffe Akha et une galette rare de Pu’er. Aussi motivée que Lyn-Yan, elle recherche ses parents biologiques. Brillante universitaire, elle a choisi comme thème de recherche le thé. Cela l’amène à connaître un Sino-Américain comme elle, le beau, séduisant et richissime Sean. Celui-ci l’emmène en Chine pour ses études, plus précisément aux racines du thé précieux, soit dans les montagnes de Nannuo… berceau de ses propres origines. Là, Hayley rencontre sa mère biologique et sa grand-mère grâce à celui qui est devenu son amoureux, Sean, qui se trouve être Xian-Rong, le fils unique de M. Huang qui a toujours cru en Lyn-Yan (et qui l’a aidé en secret). Le monde est vraiment petit…

Le livre se termine ainsi : Hayley se trouve en face de sa mère et s’exclame. Elle a enfin retrouvé sa mère ! La boucle est bouclée, le cauchemar se transforme en conte de fée. Hélas, à part la joie de Hayley que l’on saisit, le lecteur ne saura rien de plus et ne connaîtra pas l’émotion des retrouvailles de Lyn-Yan et de son enfant, ni le cours de son existence future. Les questions fusent alors : que va-t-il se passer ? Que deviennent les parents adoptifs ? Que va faire Hayley ? Lisa See va-t-elle écrire une suite ou bien laisse-t-elle à ses lecteurs le soin d’inventer les conclusions de leurs choix ? Nul ne le sait. Ce livre intéressant et agréable mérite d’être lu et je le conseille. En tout cas, je ne boirais plus le thé de la même façon.

mercredi 12 février 2025

La dernière allumette

« La Dernière allumette »

Autant le dire tout de suite : je n’ai pas vraiment apprécié ce livre que son résumé présente comme un thriller. D’ailleurs, voilà le texte que l’on retrouve sur tous les sites de vente en ligne : « Depuis plus de vingt ans, Abigaëlle vit recluse dans un couvent en Bourgogne. Sa vie d’avant ? Elle l’a en grande partie oubliée. Elle est même incapable de se rappeler l’événement qui a fait basculer sa destinée et l’a poussée à se retirer du monde. De loin, elle observe la vie parisienne de Gabriel, son grand frère dont la brillante carrière d’artiste et l’imaginaire rempli de poésie sont encensés par la critique. Mais le jour où il rencontre la lumineuse Zoé et tombe sous son charme, Abigaëlle ne peut s'empêcher de trembler, car elle seule sait qui est vraiment son frère… Un roman captivant, brillamment construit, à la fin aussi imprévisible que bouleversante et dont les personnages inoubliables offrent une voix aux enfants qui grandissent confrontés à la violence des adultes. » Présenté ainsi, on s’attend à un roman policier plein de mystère. Il n’en est rien. Nous ne sommes pas chez Stephen King. Il s’agit surtout de l’histoire assez ordinaire d’une femme nommée Abigaëlle. Narratrice omnisciente, elle parle tour à tour de son enfance, de sa vie actuelle, de l’existence de son frère Gabriel (auteur illustrateur à succès), de l’arrivée de Zoé (une jeune professeure des écoles). Elle mêle le passé et le présent. Au début, Abigaëlle prend le ton sympathique d’une fillette surdouée. Abigaëlle redevient une enfant et se raconte avec force jeux de mots qui font sourire. Là, l’auteure en fait un peu trop car même avec un quotient intellectuel très élevé, un élève de cycle 2 ne produit pas autant de traits d’humour. A travers son regard innocent et parfois naïf, le lecteur entrevoit son quotidien. Et là, c’est un véritable film d’horreur. On comprend qu’Abigaëlle habite une maison où règne la violence intrafamiliale. Son père l’aime. Il ne déteste pas non plus son fils Gabriel. Mais il bat son épouse. Sa brutalité se déclenche à tout propos. Gabriel fait tout ce qu’il peut pour protéger sa petite sœur. Quand ses parents se disputent, il l’enferme dans le placard sous l’escalier afin qu’elle ne soit pas choquée. En effet, voir sa mère recevoir des coups représente un traumatisme. Alors, la petite s’isole dans son monde, le casque de son walkman sur les oreilles pour ne pas écouter les cris. Elle voit une psychologue, le Dr Hassan car elle joue avec des allumettes, est tombée d’un toit car elle a essayé de voler grâce à des ailes en papier. L’esprit d’Abigaëlle est très confus. Amnésique, elle refoule ses souvenirs durant le passé. Au présent, elle continue à les effacer inconsciemment. Pour se protéger de toute la violence vécue, elle occulte une partie de sa mémoire. Le lecteur peut comprendre qu’elle se réfugie à juste titre dans un couvent et qu’elle a fait le vœu du silence depuis des années. Au couvent, Abigaëlle reste figée. Elle fait part au lecteur de la vie de son frère. Dessinateur de talent, il est devenu célèbre grâce à sa série de livres « Abi Colibri » qui met en scène une fillette, un oiseau et une forêt fantastique. L’une de ses fans attire son attention. Il s’agit de Zoé Boisjoli, une professeure des écoles presque caricaturale. En effet, l’adorable jeune femme voit le monde avec un grand optimisme, en rose et en bleu. Elle ressemble beaucoup à une Amélie Poulain au joli visage un peu ordinaire qui se dévouerait pour sa classe. Gentille, un peu ingénue, elle tombe amoureuse du ténébreux et très tourmenté Gabriel qui refuse d’abord ce déferlement d’amour. Ayant connu la violence, il ne veut pas fonder de famille. Or, il ne repousse pas Zoé qui ne peut pas avoir d’enfants. Le couple se forme. Le miracle survient. Zoé attend un bébé. Bien évidemment, pour qu’il y ait quelque chose dans ce roman, il faut une menace. L’ombre du passé de Gabriel plane. Sous les yeux impuissants de la narratrice du couvent, il se met à frapper son épouse si mignonne. Un ami de Zoé, Sofiane, la pousse à aller voir le Dr Garnier, psychologue. Et là, on a les dialogues entre la voix de la femme battue qui excuse son tortionnaire et la voix de la raison qui lui donne tous les bons arguments pour l’inviter à s’enfuir, à porter plainte. Les ressorts de l’emprise des pervers, la résignation et la culpabilité des victimes sont à la fois très bien expliqués et documentés. C’est vraiment persuasif. Une femme qui prend des coups doit immédiatement quitter son conjoint violent qui n’éprouve pas d’amour mais de la haine pour elle. Le suspens arrive alors : Zoé va-t-elle mourir, tuée par son conjoint ? Mais ce n’est pas tout. Elle se sent trahie. Elle suspecte Gabriel de la tromper avec sa propre sœur, Aline (mariée avec un pédiatre et mère de famille). Désespérée, va-t-elle sombrer à son tour ? Le livre change de cap. Après une longue introduction un peu pénible et une partie utile de plaidoyer contre la violence intrafamiliale, arrive un dénouement plein de désordre. Comme on dit familièrement, l’auteur a mené en bateau le lecteur. Dès le début, elle présente Gabriel comme un méchant qui enferme sa sœur, lui donne des « torgnoles », la rudoie. Elle fait même croire que leur mère est morte, assassinée par leur père. Elle va jusqu’à laisser penser que Zoé est battue alors qu’en réalité, c’est sa sœur Aline qui va voir le psychologue en utilisant son nom de jeune fille. Mais le pompon, c’est Abigaëlle et ses amnésies répétées, ses aller-retours vers le passé et le présent. Comme un cheveu sur la soupe, le coup de théâtre tombe : lors d’une énième dispute entre ses parents, c’est Abigaëlle qui meurt en traversant une sorte de vitrail qui représente une forêt (d’où la phobie de ce pauvre Gabriel présenté tout au long du récit comme un monstre alors qu’il est le gentil !). Abigaëlle repose dans une tombe au couvent. Elle est morte à l’âge de douze ans. C’est son fantôme qui parle et qui retrouve la mémoire progressivement au fur et à mesure qu’elle parle. L’auteur a allègrement semé la confusion en allant jusqu’à s’amuser avec le titre. La « dernière allumette » fait bien référence sans qu’elle ne le précise au triste conte d’Andersen. Abigaëlle est comme la « Petite fille aux allumettes », seule, meurtrie et qui trouve une échappatoire dans l’illusion et dans la mort. Par ailleurs, des ressemblances avec diverses campagnes à la sensibilisation aux violences contre les femmes font penser que Marie Vareilles s’est inspirée de plusieurs vidéos au message récurrent. Il y a par exemple la fillette qui se réfugie dans le dessin. Elle traduit ce qu'elle voit et se réfugie dans les dessins :

https://www.youtube.com/watch?v=o2xiIWHTI-U

C'est bien ce que fait Gabriel, y compris en tant qu'adulte. Il échappe à la réalité en s'exprimant par le dessin. C'est son exutoire. Quant à la voix d'outre-tombe d'Abigaëlle qui raconte sa vie passée, on en a un exemple dans la vidéo réalisée avant 2007 :

https://www.youtube.com/watch?v=nRcaxzKXV3U 

Ici, c'est une femme adulte qui parle de son histoire en quelques mots. On la croit vivante mais c'est un leurre. Si on la couvre de fleurs, c'est parce qu'elle est morte. Voilà le sort qui attend la femme battue qui ne réagit pas. L'auteure du livre a pu tirer de là son idée de départ.

Ce ne sont pas les seules vidéos pour sensibiliser aux violences domestiques qui impactent les familles. Il y en a de nombreuses et dans tous les pays du monde. En voilà une source d'inspiration pour traiter un sujet, hélas, peu original.

Pour moi, c’est évident : cet ouvrage est dans une même veine. Il n'invente rien.

Pour conclure, je n’ai pas du tout aimé le livre. A mon avis, ce n’est pas un roman. Un tel sujet de société laisse place à l’amertume.  Cependant, je conseille tout de même la lecture de ce récit déprimant capable de désorienter la logique et particulièrement ennuyeux. En effet, si ce texte plein d’émotions parvient à convaincre ne serait-ce qu’une seule femme battue à porter plainte contre son conjoint ou à fuir pour sauver sa vie, l’objectif est atteint. Déjà, ce serait fantastique. Alors, si nous suspectons ce genre de violence parmi notre entourage, il ne faut pas hésiter à partager ce livre. L’offrir, le prêter à une femme battue pourrait déclencher un réflexe de survie, pour sauver une vie. Voilà l’intérêt de « La Dernière allumette », le seul.


 

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