Plus
jamais sans moi
Les
personnes qui lisent souvent mes commentaires le savent : je lis tout et n’importe
quoi. Oui, je suis toujours partante pour découvrir un nouveau livre, surtout
quand quelqu’un le partage avec moi. Cette fois-ci, j’ai eu l’occasion
d’aborder « Plus jamais sans moi » de Maud Ankaoua. Pourquoi pas, je
peux toujours essayer, sans à-priori, vu que je ne connais ni l’auteure, ni ses
thèmes de prédilection. Alors, j’ai découvert l’histoire de Constance…
Brillante avocate parisienne, elle postule pour le cabinet de ses rêves et
obtient le poste tant convoité. L’entretien se passe bien et à l’issue, sa
patronne lui propose une période d’essai pas comme les autres. Elle paye un
pèlerinage à Compostelle à sa future employée qui sera libre de décider si elle
souhaite continuer ou non l’expérience. Alors, là, déjà, moi, un cabinet
parisien qui paye une virée sympathique à une nouvelle recrue, je n’en connais
pas. Bon, c’est de la fiction, alors admettons ! Constance est étonnée par
le procédé mais accepte. Elle ne veut pas renoncer car Lucas, l’homme qu’elle
aime, s’oppose à ce changement et tente de la dissuader de partir pour le
cabinet concurrent. En bref, la relation entre Constance et Lucas est toxique.
Ensemble depuis cinq ans, ils se séparent, se reprennent, se déchirent, se
retrouvent. Marié, Lucas promet de quitter son épouse sans jamais passer à
l’acte. Constance est déçue, désespérée. Quand elle part à Compostelle, elle
souffre d’une énième rupture et est en larmes. Elle espère se réconcilier très
vite avec son amoureux qui hante ses pensées. Mais les SMS de Lucas n’arrivent
pas…
Obligée
de commencer son pèlerinage, elle croise le chemin de Louise, quinquagénaire
dynamique divorcée, de Manon trentenaire obsédée par la nourriture et
accompagnée de Doc, son labrador noir, et d’autres pèlerins joyeux et motivés.
Constance a de la chance : à Paris, elle a des amis fidèles, dont son ex
Tristan. Tous voudraient l’aider à surmonter la rupture avec Lucas. Ils
désirent surtout qu’elle ne retombe pas entre ses bras. Suspense
insoutenable : Constance parviendra-t-elle enfin à oublier Lucas ou bien
va-t-elle rechuter ?
Alors,
là, je me suis demandé à quel genre appartenait ce livre. A première vue, cela
commence comme une romance. Constance est une pauvre femme trop amoureuse et
anéantie par sa rupture. Elle vit dans l’espoir de retrouver celui qui lui
brise le cœur en permanence depuis des années. Au début de son pèlerinage, elle
passe son temps à pleurnicher, à guetter son téléphone avec l’espoir d’y
trouver un message de son pervers narcissique qui la manipule. Non, il ne
divorcera pas pour elle. Oui, il se sert d’elle. Les affres de la trentenaire
désireuse de se caser fatiguent par leur longueur. Par chance, elle se fait
deux copines qui vont tout faire pour la sauver. C’est bien gentil. Au fur et à
mesure, tout devient clair. Le livre n’est pas seulement un roman à l’eau de
rose, c’est un traité de coaching. A travers le dialogue entre les femmes,
l’auteure démontre à ses lecteurs que pour attirer l’amour, il faut commencer
par s’aimer soi-même. Nous devons profiter de chaque instant, de nous ouvrir
aux autres, au monde, à leur envoyer de l’amour. D’accord. Permettez-moi de
résumer ce qui est conseillé à celles qui ont le cœur brisé. Un, s’aimer
soi-même. Deux, écouter ses désirs. Trois, profiter de chaque moment. 4, au
lieu de souffrir pour quelqu’un d’autre, chercher son amour en soi-même.
Constance veut savoir comment arrêter de souffrir. En même temps, elle se
complait dans l’attente et l’espoir de retrouver celui qui la maltraite. Elle
insiste et c’est un cercle vicieux.
Pourtant,
c’est simple. Pour échapper à un pervers narcissique, il suffit de couper les
ponts, de ne pas répondre à ses messages et à ses invitations. Dès que l’on
comprend que c’est un menteur, il faut l’éviter comme la peste. On n’écoute
plus les flatteries et les fausses promesses. On souffre, jusqu’au moment où
l’on comprend qu’il n’y a plus d’issue. Il ne faut pas nourrir l’espoir en
vain. Louise essaie de faire entrer ces simples préceptes dans la tête (très
dure) de Constance qui se lamente sur son sort au lieu de se prendre en main.
Elle le dit de toutes les façons possibles mais c’est la même chose qui tourne
en rond dans de nombreuses pages. C’est pédagogique, on a bien saisi. C’est
pourtant clair. Pourquoi y a-t-il autant de répétition ? C’est long,
rempli de bienveillance envers soi-même et les autres. Nous ne sommes qu’amour
universel et l’univers n’est qu’amour et nous devons nous connecter. Le roman à
l’eau de rose devient un guide de coaching, puis un traité sur la bienveillance
et se transforme en syncrétisme New Age. Encore un peu, et on va croire aux
discours d’un gourou d’une secte religieuse. L’amour doit régner et quand on
meurt, on retourne à l’amour. Nous nous réincarnons en cet amour au milieu d’un
univers infini. Ce n’est plus un roman ou un guide mais un traité ésotérique.
Mais ça ne s’arrête pas là. Le livre se termine en conte de fées : Louise
trouve le prince charmant dans la personne du coach Sacha, Manon et Tristan
tombent amoureux. Tous les quatre s’installent au Sud pour ouvrir une maison
d’hôtes. Constance se libère enfin de Lucas pour qui elle n’éprouve que
déception. Démasqué par Manon alors qu’il cherche d’autres femmes sur un site
de rencontre, Lucas est remis à sa place par Tristan. Il ne s’approchera plus
de Constance qui accepte de travailler pour le cabinet de ses rêves pour
défendre avec humanité les clients. Le lecteur parvient enfin à savoir les
raisons du pèlerinage. La patronne du cabinet l’a engagée car autrefois,
adolescente, Constance avait fait preuve d’une grande bienveillance envers les
pensionnaires d’une maison de retraite. Elle écrivait des lettres pour
réconforter des personnes âgées. La mère de la propriétaire du cabinet était
une résidente et avait reçu une lettre. Elle avait été touchée par cette aide
gratuite et désintéressée. D’ailleurs, ça se termine avec une récompense de
karma : Constance est récompensée par le pèlerinage pour le bien qu’elle a
fait autrefois. Juste retour des choses. Renvoi de boomerang… Quelle
chance ! Sauf que moi, je n’y crois pas
Cette
balade rédemptrice entre trois copines qui s’amusent et qui profitent de la vie
pour se retrouver dans une bienveillance ostentatoire m’a ennuyée. Mais je
devais lire cet écrit jusqu’à la fin pour donner un avis. Après m’être demandé
à chaque page à quel genre appartenait ce récit, j’ai finalement compris qu’il
s’inscrit directement dans la lignée des Laurent Gounelle, des Raphaëlle
Giordano (et d’autres auteurs dans le style identique que je ne connais pas
encore). Il n’est qu’un bouquin supplémentaire dans la pile des milliers d’ouvrages
de coachs qui s’inspirent eux-mêmes des travaux parus aux U.S.A.
Quand
on a lu un de ces livres (quel que soit l’écrivain), c’est du pareil au même.
Autrement dit, on en a lu un, on les a tous lus car ils parlent tous de sujets
identiques. Oui, je l’admets : je suis négative, mes pensées détruisent
mes vibrations bénéfiques et compromettent mon karma. Mais tant pis pour moi,
je l’assume : Maud Ankaoua, c’est : « plus jamais AVEC
moi » (car personnellement, je n’ai pas besoin de ces conseils, mais je
suis bonne joueuse : si ça peut aider quelqu’un, je suis contente pour lui
ou pour elle).